Lundi 27 11 00
Tout le monde est reparti. Ils ont été formidables dans l’expression
collective de leur amitié. J’ai été très touché. Ils rêvent tous
du même genre de voyage. Un jour sera le bon pour eux aussi.
Une petite sieste vers 16 heures pour préparer ma navigation nocturne,
puis je sors du port pour entrer dans la nuit vers Ibiza, cette
fois seul.
Pourquoi Ibiza et pas une autre destination ? Parce je suis libre
sur cette vaste étendue liquide, sur cet immense champs de possibilités,
d’orienter mon cap ou bon me semble.
La vie peut être très simple quand on effectue les bons choix. Je
regrette seulement de ne pas avoir suivi ce concept con comme la
lune depuis le début.
18h18 Je suis au moteur en direction d’Ibiza cap 193. 135
miles à parcourir. La météo donne du Sud à Sud Ouest pour la nuit
et la journée de demain. Pour l’instant c’est la pétole. Je suis
sorti du port avec un sentiment d’inquiétude latent. Je pensais
à l’arbre d’hélice et à la réparation qui, je l’espère, va tenir
le coup. Mais l’inquiétude est une sorte de marée noire visqueuse
qui se répand lentement pour paralyser tout ce quelle touche. Alors
je m’inquiète aussi pour mes boulons de culasse qui se sont peut
être desserrés ! A quoi le tour ? Bref je suis seul face à l’inconnue
et quelque part, ça m’angoisse un chouilla même si je ne veux pas
me l’avouer. Le trafic est intense au sortir du plus important port
d’Espagne. Je dois faire attention
22h15 Mon premier dauphin est venu me rendre visite. Je suis
allé sur le roof pour détendre la bordure de grand voile et là,
je l’ai vu. Ou plutôt, j’ai suivi son sillage phosphorescent. On
dirait une comète ondulante. Même la nuit, un dauphin c’est beau. |
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Mardi 28 11 00.
1h11 La pétole a changée de sens. J’ai arrêté le moteur
et envoyé le génois en ciseaux avec la gv. Le vent force 0.0009
est plein arrière.
2h00 Je redémarre le Volvo.
4h00 Il y a des dauphins qui me tiennent compagnie. Depuis
1 heure du matin, je dors par tranches de 15 minutes, puis 20 minutes.
Mais là je me retrouve au réveil un peu trop près d’un cargo. Donc
je réduis à 15 minutes. Cette durée me semble être la bonne.
8h00 Arrêt du moteur et je prends un nouveau cap pour remonter
au vent qui vient de s’établir au Sud Ouest. Cap 165. Vitesse 4.5
nœuds.
11h00 Je réduis le génois puis prends un ris dans la grand voile.
Le vent est force 5. Vitesse du bateau au prés : 4.7 nœuds. J’ai
du déféquer par dessus bord sur la plate-forme arrière en me tenant
au portique car les toilettes ne fonctionnent pas tribord amure.
C’était sport !
14h46 Après un petit somme (2 fois 20 minutes), je suis sorti
et je viens de voir la côte Nord Ouest de Majorca. C’est un super
moment de bonheur. D’autant, qu’enfin, le soleil daigne se montrer.
Winnibelle taille sa route au prés serré. Dans quelques heures je
virerai de bord pour revenir vers Ibiza là ou j’ai décidé de me
rendre. Quel sentiment d’intense liberté.
Il me suffit de laisser aller le vagabondage de mon esprit pour
aller ou bon me semble, grâce à Winnibelle et à quelques autres
artifices administratifs...
Le vent est inchangé Sud Ouest force 4 à 5.
18h00 Le vent tombe complètement, me revoici au moteur. Il
faudra que je change de stratégie car à ce rythme je vais consommer
tout mon gasoil. Le jour je dois avancer à la voile et passer la
nuit dans un mouillage sur la côte en attendant de trouver des vents
plus constants à l’extérieur de la Méditerranée. Cap 213 direct
vers port Ibiza.
20h00 Le vent se lève Sud Est donc travers par rapport à
ma direction, enfin un vent sympathique. J’ai donc stoppé le moteur,
non sans avoir nettoyé l’huile qui fuit du Volvo et qui s’accumule
dans le fond. Force du vent 3 Beaufort. Extra !
22h00 Pétole, en avant le Volvo.
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Mercredi 29
1h30 Le vent se lève de nouveau Sud Est 3 à 4. Vent de travers
de nouveau, ça marche !
10h30 Reprise du moteur. Après une nuit fertile en vent portant,
cela devait s’arrêter. Je navigue parallèle à la côte Est d’Ibiza.
15h15 Arrivée face à la plage après le port d’Ibiza vers le
Sud. Je suis le seul sur un mouillage d’algues. Faudra ouvrir l’œil
d’autant que je ne connais pas encore les capacités de mon mouillage
tout neuf. |
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Jeudi 30 Journée off.
Dormi jusqu'à 8h30. J’ai regardé les cartes marines pour décider
de la prochaine destination. Mais tout dépendra du vent, de sa force
et de sa direction.
Après un lunch pas très copieux (soupe et un peu de saucisson) j’ai
pris un coup de colère, arc-bouté comme un forcené sur la poignée
de la pompe d’eau de mer.
Je t’ai démonté l’engin en l’insultant copieusement. Pour finir,
je l’ai réglée en réduisant le diamètre de la pastille en caoutchouc
que m’avait déjà installé Papa. Elle fonctionne comme un charme.
Ensuite je me suis attelé à la réduction des longueurs des filières
qui, malgré les ridoirs à fond de course, pendouillaient lamentablement
au niveau des winches.
Je me suis félicité tout seul de ce bon travail. Ensuite je suis
allé en ville avec l’annexe et le petit moteur Seagull. J’ai trouvé
un cybercafé pour échanger quelques E-mails.
J’ai passé le reste de l’après-midi à déambuler tranquillement en
espérant secrètement qu’une jolie fille me tomberait dans les bras.
Hélas ! ce ne fut pas le cas.
Alors me revoilà à bord où je m’apprête à me coucher en préparation
de la navigation de demain.
En résumé, Ibiza est certainement une île sympa en été quand ça
grouille de gens pas toujours très conventionnels.
Je n’ai pas eu le temps de rencontrer grand monde à part le gérant
à tête d’homosexuel du cybercafé.
Pendant que je tapais mes textes, j’entendais un français derrière
moi s’exprimant d’une voix tellement féminine (avec le gérant ça
fait deux au même endroit !) que je n’ai pas pu m’empêcher de rire
intérieurement à l’image de ce petit PD se faisant enfiler comme
un phoque par derrière et puis pourquoi pas par devant pour varier
les plaisirs ! J’en ai rencontré un en allant chercher la météo
au club nautique du port, je l’ai croisé, il a fixé son regard bovin
sur le mien certainement fuyant à ce moment là. Il m’a gratifié
d’un sourire crétin du style du mec qui attend qu’on lui écarte
le trou du cul en guise de « Bonjour comment tu vas ? » C’est comme
à San Francisco dans ce bled. Il t’en sort de tous les coins de
rue. Mais nom d’une pipe ! Qu’est ce qu’ils ont à aimer se les faire
entre eux....les pipes ! Moi qui espérais rencontrer une gentille
jolie fille, c’est raté. Mais faut pas s’inquiéter, ils ne doivent
pas se rater par ici. En été il vaut mieux raser les murs, de préférence
de dos. On ne sait jamais, une « torpipe » perdue ! ! |
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